1 mars 2011

La Maison des éclusiers: un exemple de démarche contextualiste



Crédit photo : Geneviève Charbonneau 2007

Par Pauline Butiaux et Geneviève Charbonneau

L’espace urbain que représentent la Maison des éclusiers et la place publique attenante ne peut être pleinement compris sans savoir qu’il fait partie intégrante du projet de réaménagement du Vieux-port de Montréal (1982-1993). Redonner à la population un accès au site, préserver la morphologie des installations encore présentes et inciter à la préservation et la mise en valeur des vestiges, telles sont les grandes lignes directrices qui émanent des consultations publiques menées par la société du Vieux-Port, de 1985 à 1986. En 1990, l’agence montréalaise Cardinal Hardy propose alors un plan directeur qui, en respectant les enjeux énoncés ci-dessus, offre une expérience urbaine ancrée dans une approche de contextualisme à l’européenne du design urbain.
Située à l’entrée du canal Lachine, dont la réouverture constitue l’intervention principale du secteur ouest du projet, la Maison des éclusiers s’inscrit parfaitement dans cette approche néo-empiriste de l’aménagement. Plutôt que d’être traitée à la manière d’un artéfact, ce qui aurait pu être perçu comme un objet affranchi, elle apparaît ici comme un point pivot entre le Vieux-Port, le parc du Canal Lachine et le reste de la ville. En effet, situé au bout de la rue McGill, face au Silo n°5 et au niveau de la première écluse, le petit pavillon tire parti de sa situation pour tisser des liens entre les forces en présence.
Selon les dessins du plan directeur, le nouveau pavillon s’inspire de la typomorphologie du bâtiment d’origine : un volume cubique ouvert sur le canal et parallèle à celui-ci, incluant une petite tour aujourd’hui cylindrique, mais autrefois de plan carré. Les références formelles évoquées par ce bâtiment concernent principalement le silo no.5 : la tour reprend la forme du silo, et le toit possède un versant qui vient accentuer les lignes verticales du monument industriel par l’utilisation de tôle ondulée. C’est une fois les bâtiments alignés sur un axe central, avec le silo en guise de toile de fond, que la relation qu’ils partagent devient flagrante. L’expérience visuelle est particulièrement appréciable rue McGill, coin de la Commune (Image).

Le traitement réservé aux matériaux, où la lourdeur du béton s’associe à la légèreté visuelle des structures d’acier, rend nécessairement un hommage aux prouesses technologiques de l’époque industrielle. Ces mêmes matériaux sont repris au niveau de la place publique, qui devient alors le prolongement du pavillon, facilitant ainsi son intégration au parcours urbain.

Aujourd’hui multifonctionnelle, intégrant buvette, café et bar, la Maison des éclusiers devient un pôle d’attraction redonnant échelle humaine à cet espace dominé par la présence monumentale de ces structures industrielles d’un autre temps. S’insérant dans un contexte historique et formel précis, elle réussit à créer des liens avec le présent par une interprétation libre et moderne de l’architecture vernaculaire habituellement associée à une maison d’ouvrier. Par sa large inscription dans le contexte historique, architectural et urbain qui l’entoure, le site de la Maison des éclusiers reflète la démarche néo-empiriste, voulue pour l’ensemble du projet de réaménagement du Vieux-port.

Références :

Desloges, Yvon, Alain Gelly. 2002. Le canal Lachine : du tumulte des flots à l’essor industriel urbain, 1860-1950. Ottawa : Parc Canada, 214, ill.

Rose, Peter, Cardinal Hardy et associés et Vieux-Port de Montréal. 1990. Vieux-port de Montréal : plan directeur d’aménagement. Montréal : Cardinal Hardy et associés, 101p. ill.

Société du Vieux-port de Montréal. 2011. « Patrimoine : Écluses 1 et 2 ». In Quais du Vieux-port de Montréal. En ligne. <http://www.quaisduvieuxport.com/patrimoine/ecluses-1-et-2.html>. Consulté le 15 février 2011.

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