19 février 2011

Les multiples visages de Benny Farm

Crédit image : L'OEUF 

Par Maëlle Plouganou et Tania Paz 

L’histoire du complexe d’habitation Benny Farm remonte à 1947, année durant laquelle la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) devient propriétaire des terrains de la ferme Benny dans le quartier Notre-Dame de Grâce. Elle y entreprend la construction de 64 immeubles de 3 étages totalisant 384 logements pour y loger les vétérans de la deuxième Guerre Mondiale (Centre d’histoire de Montréal, S.D.). L’aménagement de l’ensemble urbain évoluera tant sur le fond que sur la forme à travers les années, devenant le théâtre d’affrontement entre diverses visions du développement urbain.

Du modernisme au développement durable, en passant par l’advocacy planning
Les habitations Benny Farm amorcées en 1947 correspondaient au mouvement moderniste. Inspiré des cités-jardins de Howard, le quartier proposait une organisation de l’espace fonctionnelle composée d’ensembles d’habitation relativement denses pour l’époque, entourés d’espaces verts récréatifs (Roy, 2006).
Le redéveloppement de Benny Farm à partir des années 1990 peut être considéré comme un exemple d’advocacy planning et de design participatif. En effet, pendant plusieurs années les résidents, soutenus par des groupes communautaires et professionnels et la SCHL ont été en désaccord sur la direction à donner au réaménagement du site. La SCHL pensait détruire pour reconstruire, alors que les résidents, soutenus notamment par l’Office de l’Éclectisme Urbain et Fonctionnel (ŒUF), souhaitaient réhabiliter les constructions existantes. Ce travail de soutient aux populations correspond à la vision de la pratique développée dans les années 1970 où les urbanistes cherchent à soutenir, impliquer et conseiller les citoyens dans la transformation de leur communauté: « The role for urban designer[…] should be less authauritarian (more humble) and more overtly political, with the goal of empowering people to improve their communities and their environnement » (Ellin, 1999 : 71).

En 1999, la Société immobilière du Canada (SIC) est devenue propriétaire du site. Dès lors, une démarche participative qui regroupe des résidents, des acteurs communautaires et institutionnels et des experts a été mise en place à travers l’agence Convercité, pour permettre une plus grande acceptabilité sociale du projet. Cette démarche répond au souhait formulé en 1967 par l’American Planners Association « to enlarge the purview of planners beyond physical planning and include social, economic, and environmental issues as well » (Ellin, 1999 : 65).

Benny Farm est également un exemple d’environmental design de par la réutilisation des matériaux préexistants dans la rénovation des bâtiments, ainsi que par l’utilisation à plus grande échelle de technologies vertes. Ainsi, la géothermie,  les toits verts, les panneaux solaires et les marais filtrants furent employés pour le chauffage, l’isolation, l’énergie électrique ou le traitement des eaux grises, ce qui lui valut de nombreux prix (Design Montréal, 2008 : 13).
À travers près de 70 ans d’histoire, plusieurs courants ont modelé le site de Benny Farm. Aujourd’hui, l’unicité de ce projet réside certainement dans l’intégration de tous ces courants dans un seul ensemble urbain, mais surtout dans le fait qu’il transforme et est transformé continuellement par la communauté, ce qui en fait un authentique projet de design urbain.

Bibliographie

Centre d’Histoire de Montréal, Coupal, E et Lefebvre, J. (S.D.), Enfin la moisson à Benny Farm 
Design Montréal. (2008), Vingt et un projets montréalais pour amorcer durablement le 21e siècle, Cahier des bonnes pratiques 3, Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec.
Ellin, N. (1999), Postmodern Urbanism. Camnridge, Mass. : Blackwell.
Roy, M. (2006), Le projet Benny Farm, un modèle d’architecture urbaine et de développement durable, conférence prononcée le 25octobre 2006.
URL: http://www.forumurba2015.com  consultée le 7 février 2011

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